La Prophétie de
Sir William Hope
Les textes prophétiques, plutôt rares du côté américain, sont surtout le fait des Amérindiens. Aussi le texte de Hope fournit-il un outil fort utile à l’historien et au mythologue.
Le texte de la prophétie
de Sir William Hope
Depuis 1879, la Bibliothèque du Congrès possède un curieux ouvrage publié en 1724, Vindication of the True Art of Self Defense. Ce traité d’escrime, qui porte la signature de Sir William Hope, député-gouverneur du château d’Edimbourg, passerait inaperçu si, d’après M. P. Hall, l’on n’y trouvait une prédiction étonnante du destin des Etats-Unis, quarante-quatre ans avant le début de la Révolution américaine. La prophétie commence par ces mots :
« Le Chaldéen dit qu’il aura un destin de grandeur
Celui dont les étoiles annoncent la fortune.
De ton proche destin, ô Amérique
Je lis la prophétie dans le ciel :
Quatorze divisés, douze demeureront identiques ;
Seize coupés en deux – chacun garde son nom ;
Quatre plus huit, plus sept, plus six – ajoutons un zéro,
Marqueront la ligne de vie de quatre grands hommes.
Ce jour naîtra, bien au-delà des mers,
Celui dont le destin, inscrit dans les étoiles,
Sera de gouverner esclaves et hommes libres.
Quarante-quatre sera le nombre que l’on ajoutera
Pour trouver la date fixée où les hommes à genoux
Se lèveront pour saluer la liberté.
Placez les six avant les dix qui donneront le nom du patriote
Dont les hauts faits lui assureront une gloire immortelle ;
Ajoutez quarante-quatre et le jour sera fixé
De celui dont l’amour sans cesse croissant et la confiance jamais
Démentie qu’il inspirera
N’existeront que pour le bien de tous
Et refléteront les couleurs de sa lumineuse vérité !
La porte de la mort claquera quand ce siècle encore
Ne sera point achevé ;
Et les planètes dessineront d’autres destins.
Jusqu’à ce que tous les noms s’effacent au parchemin de la liberté,
On creusera deux tombes et on élèvera son cénotaphe grandiose.
Six fois dix années s’écouleront,
Puissamment aidée par la Nature, guide fidèle et prudent.
Alors les deux sept du destin signaleront le fils héroïque
Que Mars et Jupiter frapperont, laissant son œuvre inachevée,
Le sort cruel le touchera sans user de l’épée,
Lui qui laissera la triste scène de la vie sans un mot d’adieu.
Etoile discrète, à demi-voilée par la nuée rouge de Mars,
Enveloppée du suaire de la vertu, son manteau de noblesse.
Les deux huit gouverneront une génération à venir,
Et l’éclat du passé, intact, resplendira dans l’aube du progrès.
Ajoutez six, et six encore,
Alors se lèvera le chef resplendissant, bon brave et sage,
Quatre fois six désignent une étoile scintillante
Qui brillera sur sa route
Et deux fois « quatre fois six » marqueront ses années,
De la naissance à la fleur de l’âge.
Ces prophéties verront leur achèvement
Avant que le dix-neuvième siècle ne disparaisse
Dans la nuit des temps !
Planètes, étoiles et douze signes de l’horoscope
Attesteront tous la véracité des prophéties de William Hope. »
Un parent de William Hope – peut-être son fils – a ajouté ces lignes :
« La main érudite qui a écrit ces vers
N’écrira plus pour moi ;
Pourtant s’élèvera toujours la voix,
Toujours battra le pouls
Pour les générations à venir.
Votre serviteur, l’âme épurée par l’amour des siens,
A d’abord déploré la vanité d’une existence laborieuse,
Puis découvert la vérité en cette quête de toute une vie.
Toute grandeur est un don du Seigneur. »
James Hope cité dans l’ouvrage de M. P. Hall, The secret Destiny of America, pp. 137-145, traduction d’Odile Garel et Michel Michaud.
Lauric Guillaud
Le commentaire de
Jean-Charles Pichon
La prophétie s’ouvre sur deux paradoxes. L’un concerne sa datation, le second les deux décomptes qu’elle contient. Ces deux paradoxes n’en feraient-ils qu’un, comme si l’un justifiait l’autre, ou comme si celui-ci illustrait celui-là ? Il conviendrait dès lors de distribuer dans le texte et dans ses datations 2 modes de lecture et 2 dénombrements.
Les lectures
Le poème figure dans un ouvrage de 1724, « Vindication of Art of Self Defense » ou « Comment se défendre soi-même ? », qu’on a pu prendre pour un traité d’escrime, quand il s’agit peut-être de tout autre chose, quelque combat plus essentiel, que le traité imaginerait seulement. Mais le poème porte la mention : « Ecrit à Corn Hill, Londres, 1732 ». Comment un texte de 1732 figure-t-il dans un ouvrage de 1724, certainement composé avant cette date (entre 1720 et 1723) ? Quand le poème dit : « Ce jour naîtra bien au-delà des mers… », dit-il un jour de 1720, de 1723 ou de 1732 ?
La question est plus importante qu’il n’y paraît. Car les premières dates situent l’ouvrage au plein cœur de la transformation majeure de la Franc-Maçonnerie de l’opératif au spéculatif (1717/1728), tandis que paraît la première édition des « Principes de la science nouvelle » de Vico (1725), sur lesquels se fonderont deux siècles de « chronologie spéculative » : un partage trilogique de toute Histoire (d’une société, d’une nation, de l’humanité) : une phase royale ou divinisée, une phase aristocratique ou héroïque, une phase populaire et civilisatrice. De cette trilogie, les uns feront une décadence de la Foi (comme du sacré au sacerdoce, par le sacrifice), les autres une naissance et une croissance de la Raison (spéculative), tandis qu’une 3ème espèce d’humain y verra le travail – occulté – du romantique, du symboliste et du surréaliste vers l’élaboration d’une nouvelle croyance (un jeu).
Toute Franc-Maçonnerie, depuis la Renaissance, rejette la religion, de toute manière condamnée, par sa dégradation. Mais, d’abord, jusqu’en 1717, l’Opérative des princes (qu’on nous dit écossais) et des poètes, des artisans, des joueurs, libertins ou baroques, a fondé son ésotérisme sur une tradition vieille de cinq millénaires, « Chaldéenne » en effet, dont les constituants furent et demeurent : le Roi/Lion souverain, le Taureau créateur, le Scorpion (ou le Verbe intérieur, inconscient) et l’Arbre, depuis celui de l’Eden ou de Sumer (le kish-kanu) jusqu’à l’Arbre de Liberté – par Bacchus/Dionysos, nés de la Vigne ou de l’Arbre.
Cette Franc-Maçonnerie attend un « retour à l’Eden », dont toutes ses imageries portent la trace : l’Adam créé, Nemrod, Noé, Gilgamesh; des chaldéens. Aussi les appelle-t-on, ces croyants d’un autre Age, non seulement « enfants de la Ténèbre, occultes ensorcelés » mais « rétrogrades ou passéistes ». Leur Eternel Retour, d’abord, est prohibé. A l’inverse, les Spéculatifs, « fils de la lumière », opposent la « science nouvelle » de Vico aux délirants, aux fous. Leur donne n’est pas des 4 mais des 3 : des 3 phases mais aussi des 3 mythes d’Air : la Fraternité (gémellique), l’Egalité (de la Balance) et, tout différemment, l’Arbre de liberté. Leur drame ? Ils y confondent les 3 de la synarchie mosaïque : le Souverain, devenu le Peuple souverain, l’Archer ou Sagittaire, l’Arche de Moïse, devenu le grand Architecte, l’envoyeur du progrès, et le Bélier d’Abraham et d’Israël (Jacob). Quand cette trinité de Feu n’a rien à voir avec une trilogie d’Air…
La date 1732 a une signification tout autre. Alors, le mathématicien génial Euler aura tiré la sommation (e-1), terme de toute durée, du « e » logarithmique. Le Franc-Maçon Ramsay, compagnon des poètes et des Mères quiétistes, ainsi que de Fénelon, prépare sa révolution, qui est de rappeler aux F.-M. leur prestigieux passé. La date de son Discours célèbre sera sensiblement celle que Potocki donnera à l’écriture de son « Manuscrit trouvé à Saragosse », la première œuvre tout à la fois ésotérique et fantastique des temps modernes. Utilisateur des nombres positionnels et de leurs groupages, Potocki est lui-même l’auteur de « Principes de chronologies », plusieurs fois édités et toujours inconnus. Par sa constante, Euler oppose la « durée de vie » d’un corps, d’une particule, d’un homme à la rigueur des cycles; Ramsay, puis Potocki tentent de jouer des 2 lectures, des 2 nombrements. Mais le véritable auteur des « nombres de position » n’est pas Ramsay ou Potocki; c’est Sir William Hope.
Les nombres
Un tout premier calcul, en son poème, recouvre les millénaires, au moins Cinq (4876), dont nous savons seulement que l’Histoire les partage en 4 durées de vie, par la succession de 4 « grands hommes ». Pour l’instant, au début de notre lecture, nous ne pouvons en dire rien de plus, sinon que cette durée – et son partage en 4 – doit englober non seulement le déclin du Chaldéen (opératif), mais son renouveau, au terme de la période spéculative. Car Vico n’a jamais donné la 3ème phase de sa trilogie, populaire/civilisatrice, comme définitive et sans suite (pas plus que ne le serait la 3ème phase d’un jour, d’un mois ou d’une année).
C’est à ce jour, ce mois ou cette année que sir Hope donne la durée cyclique de 177 ans. Il nous la donne encore en nombres positionnels : 14 divisés en 7 et 7, le 12 insécable et 16 partagés en 8 et 8. Quantitativement, ce serait le nombre de l’Apocalypse : 14+12+16=42 (contenu en3,5 ans, contenant de 1260 jours). Mais, positionnés, les trois nombres donnent : 77+12+88=177.
Sir Hope l’ignore – car, en son temps, les planètes lointaines sont inconnues – mais 177 ans est la période au terme de laquelle Jupiter, Saturne, Neptune, Uranus et Pluton se retrouvent en ligne droite : un évènement qui ne peut être sans conséquence !
Les 177 et la passe d’armes
Fidèle à l’esprit de son traité d’escrime ainsi qu’aux systèmes trilogiques de son temps, sir Hope a décomposé le nombre positionnel en 3 phases bien distinctes :
– une phase de 77 ans; les 7 dans un sens et les 7 dans l’autre de l’hindouisme ésotérique : 10/14 = 0,714 (pour les 0,718 de « e-2 »);
– une phase indivise de 12 ans = 6+6, dont il jouera, différemment, en même temps que des 10;
– une phase de 88 ans, qu’il dédoublera en 44 et 44.
La 1ère phase (a) peut être dite du Jeu pur, de mise en position, en marche, en train ou d’escarmouche : un engagement léger, tout de feintes et de reprises (à fleuret mouché parfois);
la 2ème phase (b) est dite « de garde », dans le double sens du mot : regarder, surveiller – et se protéger, se garder : la reprise en main;
la 3ème phase (c) sera le combat proprement dit, dont l’issue sera mortelle, ou du moins dramatique (une victoire, une défaite) pour l’un ou l’autre des adversaires. C’est 1636 que « combattre » a pris le sens : « se battre contre » et en 1740 le sens : « rivaliser avec ».
Le 1er cycle
Qu’il parte de l’an 1720 ou de l’an 1732 : les 12 ans de la Garde, sir Hope ne commence point par (a). Il laisse au passé les 77 ans de l’escarmouche, qui a suivi le double drame que furent le protectorat de Cromwell et la Fronde en France (1648/1658 ou 1653), les 1ères explosions puritaines, populaires.
La phase (c) seulement lui importe, première de la Prophétie, 88 ans (1732:1820), qu’il partage en 2×44. 44 ans, dit-il, séparent la date retenue (1732) de la proclamation de la Liberté. Ce sera, en 1776, la Déclaration d’Indépendance.
Les 44 ans suivants seront tout autres, riches en conflits de vingt natures : révolutions, Terreur, guerres entre Etats… Sir Hope annonce la mort du Héros de l’Indépendance, Washington, pour la fin de son siècle : il mourra en 1799. Mais alors Bonaparte se lève, qui fera trembler le monde jusqu’en 1815, tandis que les U.S.A. doivent combattre sur deux fronts : contre l’étranger (Angleterre, Espagne) et contre le peuple américain (indien). Le mot : Terreur dit tout, qu’elle soit rouge ou blanche, de part et d’autre des conflits mondiaux. Tout le romantisme en est sorti, fantastique en Allemagne, Angleterre et Russie, sentimental en France : un pâle reflet de l’Opérative…
Le 2ème cycle
C’est le seul complet dans le poème de Hope.
Les 77 ans de (a) se prennent évidemment de 1820 à 1897. Au point de vue spéculatif ou utopique, cette date achève la prophétie, qui prendra fin avant la fin du 19è siècle.
En cette prise d’armes, un seul conflit excède l’escarmouche : la guerre de Sécession, dont la nation américaine n’a pas encore guéri. Quant au reste, y compris le massacre des Indiens, comparable au massacre des peuples Latins par Rome, cela n’a guère troublé que les poètes, les sectes des Mormons, des Adventistes, de Brook Farm ou des « Red Men » : des occultistes.
Le héros triomphateur, ici, se nomme Abraham Lincoln, « qui ne mourra point par l’épée » : un coup de revolver le tuera. Il sera le seul qui méritera un cénotaphe, quand deux autres présidents devront se contenter du tombeau. Lesquels ? Les commentateurs du poème ont proposé plusieurs noms, dont Jefferson est toujours le premier; quant au second, il était, bien sûr, le président régnant au temps du commentaire.
Si l’arrivée du May Flower en Amérique correspond à la fondation de la Rome républicaine, anti-étrusque (vers 500 avant J.C.), cette phase (a) correspond à la période -300/-210, où Rome a promulgué ses lois et assuré sa république, en dehors des conflits mondiaux, ne se reconnaissant que cet ennemi : le Latin, jusqu’à son extermination. Comme nous le savons, une « belle époque » de quelque 12 ans achève ici et là le temps des escarmouches : de 1898 à 1910, en ce qui nous concerne. Une autre phase (b).
« La prophétie achevée », selon ses propres mots, Hope se montre moins prolixe. Deux vers lui suffisent pour dire le siècle qui suivra (le 20ème); « Les deux 8 gouvernent une génération à venir, Et l’éclat du passé, intact, resplendira dans l’aube du progrès ». Mais on ne peut en dire plus si courtement.
En ces 88 ans (1910/1998), l’enjeu ne sera plus la Liberté, ni la « Nature » : ce sera le Progrès, par la Science. Mais, en dehors de ses effets terribles : les nouvelles armes, les bombes puis l’atomique, les maladies nouvelles, l’empoisonnement de tous les vivants, l’effet de serre, la science se sera faite aussi archéologique, épistémologique, ethnologique. Elle ressuscitera le Passé, ses mythes et ses dieux, parmi lesquels le Chaldéen. L’occultiste, l’Opératif, ne sera plus seulement la Bête à détruire : des milliers de sectes le rénoveront.
On remarquera que, les 88 ans, sir Hope ne les partage pas en deux fois 44. Il le pourrait car, en 1954 (44 ans après 1910) Staline sera mort, ainsi que Mussolini, Hitler, tous les tyrans du siècle. Mais c’est alors que la Science a tout recouvert et que les plus grands fléaux menacent, jusqu’à l’attente du fléau terminal, le Jugement Dernier. Depuis cette même date (Watson invente sa machine en 1953), on distingue de moins en moins aisément le raisonnable du fantastique, et du progressisme le messianisme, etc.
Le 3ème cycle
En cette année même, 1998, devrait commencer une nouvelle période de 177 ans, par la phase (a) de l’escarmouche, du jeu. Mais Hope est désormais hors de toute prophétie et de toute utopie : il est esclave du Retour.
Il ne dit même plus les 77, mais les 66 (que nous devrons expliquer). Puis, aux 66 (1998/2064) ne suucéderont pas les 12 années de « garde », mais 24 (4×6) et 48 (2×24), qui nombreront la vie de quelque nouvel Empereur, son panthéisme et le retour du Chaldéen – et l’apparition de l’Etoile en leur milieu. Les nombres sont ce qu’ils sont; on ne peut rien contre eux.
Mais, pour éclairer et, peut-être, préciser les nombres de cette dernière partie du poème, il est utile – sinon indispensable – d’en revenir à la première, laissée dans l’ombre. Il apparait enfin que Hope connaît les nombres de l’ésotérisme et de l’astrologie classique (de Platon à Joachim de Flore, par l’Apocalypse) : une Grande Année de 25 920 an, une « ère » de 2160 ans, une « durée de vie » ou Unité de Temps de 1260, aux 7/12 de l’ère. Il les connait mais les refuse, dans l’intention de corriger l’astrologie par l’astronomie (les Lois de Kepler) et l’ésotérisme des 12/7 par la constante « e-1 » d’Euler, qui oeuvre vers les mêmes temps : sa grande « communication » sera de 1732. Selon les nouveaux calculs, la Grande Année ne serait plus de 25 920 ans, mais de 25 488; l’ère serait donc de 2124, non de 2160, et la phase « abraxale » de 177, non de 180.
Une ère (2124 ans) sépare l’ancienne Etoile, 6 ans avant l’an 0, de l’Etoile future, en 2118. Celle-ci rayonnera au centre ou milieu d’une période de 48 ans (« deux fois quatre fois 6 »), qui surviendra « quatre fois 6 » après l’avènement du futur Empereur et 24 ans aussi avant son terme. Comme 44 ans se sont écoulés du Pontificat d’Auguste à sa mort (-29/+15) et 48 ans depuis sa prise de pouvoir. La même date de l’Etoile chrétienne, -6, situe l’Evènement dans la Grande Année (de 12 ères précessionnelles). Elle s’impose 4248 ans (= 2 ères de 2124) après l’avènement du Taureau Créateur, le Chaldéen, en -4254. Et 628 ans (6+622) avant l’Hégire.
4248+628=4876.
Le partage des 4876 en 4 « durées de vie » nous donne :
a) 1219 ans de l’Eveil du Taureau chaldéique au dernier roi de Kish, Gilgamesh, de -4254 à 3033;
b) 1219 ans, de Gilgamesh à la renaissance taurique en Babylone, ou de -3033 à – 1816, qui vit aussi le retour au culte d’Apis en Egypte et, sans doute, le triomphe du dernier patriarche, Josephe, le rêveur des Vaches et des Epis;
c) 1219 ans, de -1816 à -597, le triomphe de Nabuchodonosor sur Jérusalem et le Bélier : le nouveau taureau Mardouk/Bêl;
d) 1219 ans, de cette date à l’Hégire, et au triomphe de Mahomet le créateur du Coran, le rénovateur du Veau d’Or par la Vache Rousse du Coran. Selon ce décompte chronologique, c’est en 1841 que le renouveau de la Création serait à situer. Ni Edgar Poe ni Nerval et Baudelaire ni le Bab musulman n’en jugeront autrement. 1220 ans après 622, 1842 est sans doute l’année du siècle où le plus grand nombre de poètes, d’ésotéristes et de savants ont vu le jour. C’est aussi l’année où le grand Edgar Poe a créé les premières « machines célibataires », en prélude à son Eureka.Une autre création naît là, tout autre que les Babylone ou le Coran.
Quant au rapport :
ère ou cycle/durée de vie, il est passé de l’ésotérisme classique :2160/1260 à 2124/1220 ou (e-1), d’abord nombré : 1,723… avant son affinement à 1,7182… Cette sommation de la série des factorielles inverses nombre aujourd’hui la durée de vie de toute particule élémentaire.
La sixte
Un 3ème nombrement parcourt tout le poème (prophétie et retour) dont je n’ai rien dit. Ses constituants sont le 6 et le 10.
Des vocables l’explicitent; d’étranges « groupages » de nombres en tirent d’autres jeux.
Les sommes, produits et fractions nous ont donné :
4+3=7; 4×3=12; 12/2=6; 12/3=4; 12/4=3.
Le 3 (dernière des dimensions premières) et le 4 (premier des multiples) y demeurent les facteurs déterminants, sur lesquels s’est fondé l’enseignement scolastique, jusque vers 1453, où les étudiants parisiens ont rejeté le « trivium » et le « quadrivium » de Boèce (3 arts et 4 « sciences »), se moquant désormais, par le quolibet, « du tiers comme du quart ».
Au siècle suivant, la « quarte » ne subsistera guère que dans « le quart d’heure » de Rabelais (le règlement des comptes), tandis que l’écrivain lui-même recherchera dans la « quinte essence » comme un écho du Pentacle de Salomon ou des 5 âges d’Hésiode, les cinq « règnes » des prophètes médiévaux. Puis, la « sixte essence » succèdera à la quinte, en 1640. Jusqu’à Vico, la « tierce », rejetée, aura donné « le tiers exclu » des logiciens et le « tiers », l’étranger au procès dans le langage judiciaire. Tierce, quarte, sixte n’auront gardé un sens que dans les jeux : un « temps » en liturgie, un « intervalle » en musique, une suite dans les jeux de cartes, une « position » en escrime.
La tierce est une garde (3ème). La quarte est la 4ème des 8 positions d’attaque, dans le combat. La sixte est la parade « en ligne haute », dès le 18ème siècle.
Or, jouant du 10 (le doublement du 5 platonicien), dont la Révolution française fera la base de ses calculs, et du 6 (au1/2 de 12), sir Hope en tire de bien curieuses combinaisons – au moins ces 3 :
a) il positionne le 6 avant le 10 (les 10 lettres du nom : Washington)… Puis, ces 610, au ½ de 1220, lui permettent de transformer le terme d’une « durée de vie », par exemple 1842, 1220 ans après l’Hégire, en date-pivot, centrale, entre le dernier grand éclat du christianisme (1232) et la proclamation de la religion future : 2452, 2124 ans après l’institution de Constantin.
Je suppose ces dates ? C’est vrai, mais elles sont conformes au reste. Ainsi qu’aux prophéties de Joachim de Flore à Nostradamus.
Mais, surtout, le renversement que permet le nombre 610 et le principe qu’il révèle, de l’inversion du terme au milieu, du centre au terme, nous éclairent sur les 2 lectures que sir Hope donne du cycle des 177 ans : dans son énoncé : 77+12+88, un temps que l’entropie et le désastre achèvent, et dans l’application à son époque : 88+77+12, qu’une garde achève (la Belle Epoque). Comme si le pire pessimisme et l’optimisme le plus ferme n’étaient que des lectures du temps : de l’après-dîner du jour à celui du lendemain, le Jour de la Genèse et du Coran; d’un grand midi à l’autre, celui de l’ancienne Egypte, de Sumer et de Rome, du Colloque des Oiseaux, de l’Aurora consurgens et de Saint Jean-de-la-Croix.
b) Tout autrement, le 6 et le 10, quantitatifs, donnent les 60 de la Vindication, dont les datations ne tiennent aucun compte. Mais nous savons que ce fut le nombre de Sumer, d’Akkad, des Chaldéens – et de certains peuples d’Afrique jusqu’au début de ce siècle pour nombrer l’Unité.
c) Alliant les 2 lectures, positionnelle/quantitative, sir Hope, en la dernière partie de son poème, trouve 6+60=66. Il ne poursuit pas le compte (afin de ne pas trop scandaliser le lecteur ?). Il trouverait en effet : 6+60+600=666, le nombre de la Bête selon l’Apocalypse – de la Bête chaldéenne et cornue, le Taureau. L’objet de toute sa quête. Car le mot anglais lui-même : Vindication peut porter les 2 sens : la vindicte, le combat (dès le 13ème siècle), ce qu’achève la mort, et la revendication (au 16ème siècle) pour dire la demande de l’obtention d’une chose interdite ou refusée. Vindication ne dit pas la quête – exemplaire – d’un Modèle proscrit sans dire l’exercice, la défense de soi-même, qui y conduit. Par le degré de liberté de la personne humaine (JE), d’une part; sa foi indestructible de l’autre.
C’est assez démontrer que, malgré l’apparente « vanité de son existence laborieuse », sir William Hope n’a pas perdu son temps.
Jean-Charles Pichon
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